En relisant Kourouma
Relu dernièrement Quand on refuse on dit non de Ahmadou Kourouma. C’est le roman inachevé sur lequel il travaillait au moment de sa mort en 2003 et Birahima, l’enfant soldat d’Allah n’est pas obligé en est de nouveau le héros. L’un des intérêts du livre, en plus de la féroce innocence du Birahima, c’est que Kourouma met en scène les acteurs de l’histoire politique de la Côte d’Ivoire, nous faisant percevoir les germes de la divisions depuis les travaux forcés de la colonisation jusqu’à l’incroyable rouerie de Houphouët. L’intrigue du roman est simple. Après sa participation à la guerre civile au Libéria, Birahima a rejoint son oncle à Daloa et est un chenepan d’Afrique de l’Ouest presque normal. Il va à l’école coranique et apprend un métier chez un transporteur. Il ne souffre pas du tout de stress post-traumatique et autres maladies de blanc :-). Sauf qu’un jour la ville est attaquée par les troupes de Gbagbo qui assassinent les hommes valides et pillent les propriétés mais ne touchent pas aux femmes et aux enfants parce que: « La religion de Jésus-Christ interdit formellement aux catholiques de faire le moindre mal à des enfants, des femmes, des vieillards et des enfants innocents. » Après ce massacre, la brillante fille de son maitre d’école coranique demande à Birahima de l’escorter vers le Nord et lui confie une Kalashnikov. Au cours de ce voyage, elle lui raconte l’histoire de leur pays et le livre est une sorte de retranscription de ce que Birahima comprend de cette histoire entrecoupé d’évènements survenant pendant le voyage et de réactions de B. sur ce qui l’entoure.
Je vous met deux extraits. Le second souligne ce que j’ai toujours pensé de FHB. Ce mec, par je ne sais quel miracle (l’aide de la France et la corruption de tout ce qui l’entourait?) a réussi à se faire une réputation de « sage de l’Afrique » alors qu’il n’était rien d’autre que le pillard le plus corrompu que l’Afrique ait connu, incapable de se préoccuper des intérêts de son peuple et s’employant avec toute son énorme intelligence à cultiver son mythe de sorte à continuer à mettre tout le pays à son service. Il a promu des médiocres y compris dans le rang des opposants et a très tôt (dès avant les indépendances) abandonné toute velléité de résistance aux intérêts français. Son unique cause, pendant la colonisation était de faire en sorte que les planteurs africains qu’il représentait bénéficient des mêmes atroces avantages (les travaux forcés) que les colons et s’enrichissent comme ces derniers. Ce n’est que par hasard, et non par humanisme, qu’il a fait abolir ce système esclavagiste. Capitalisant sur ce premier geste politique incontestablement bon, il est passé de reniement en reniement d’une situation d’opposant aux planteurs coloniaux à celui de laquais le plus obséquieux de la France.
Le livre ne fait que 150 pages et mérite d’être lu.
Les victimes avaient de la chance: au lieu de pourrir pour servir d’humus au sol qui donne le meilleur chocolat du monde, leurs membres et leurs têtes servaient de repas succulent aux fauves et aux cochons, des bêtes vivantes. Il est beaucoup plus valeureux de nourrir des bêtes que de fournir de l’humus aux plantes. Les plantes, ça ne bouge pas et ça n’a jamais dit grand chose. Les bêtes ça se déplace, ça court, ça voltige, ça hurle, ça grogne et même parfois ça court après l’homme, ça l’attrape, le renverse et le mange vivant. Gnamokodé (putain de la mère)!
…..
« A qui pensez-vous, Monsieur le Président? »
Le « vieux » répondit par une question:
« N’y aurait-il pas dans l’armée ivoirienne, quelque part, un saint-cyrien d’ethnie yacouba?
-Oui Monsieur le Président… Mais vous ne pouvez pas songer au capitaine Gueï pour un poste de responsabilité de cette valeur! Il est très peu sérieux, et surtout il aime beaucoup l’argent et les femmes. C’est l’officier le plus corrompu parmi ceux de son rang.
-Monsieur le ministre, je vais peut-être vous étonner. Mais l’expérience montre que les gens trop propres ont des difficultés à réussir à un certain niveau de responsabilité. Ce capitaine est l’homme qu’il me faut.
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