Hady Ba's weblog

Sortir du Franc CFA ?

Posted in Afrique, Economie, Françafrique by hadyba on août 27, 2017

Il est des combats dont la justesse parait évidente. Devons-nous sortir du FCFA ? Évidemment que si ! Le franc CFA n’est même plus une monnaie, c’est un symbole, c’est une survivance d’un passé criminel. C’est la preuve patente de la continuité de l’oppression dont nous autres africains sommes victimes. D’ailleurs, FCFA signifiait à l’origine Franc des Colonies Françaises d’Afrique et si le nom a changé, la chose n’a guère évoluée. La conservation des initiales est ainsi une sorte d’acte manqué à la Freud.

Je suis d’accord avec tout cela et ai bien plus de critiques encore pour le FCFA, son arrimage à l’euro, notre rapport de subordination à la France, etc. Il n’en demeure pas moins qu’en tant que philosophe, j’ai été entrainé à interroger l’évidence. Le FCFA est-il une cause ou est-il un effet ? Que se passera-t-il si nous prenons cette décision qui nous paraît évidemment bonne de sortir du FCFA sans avoir soigneusement et stratégiquement préparé notre sortie ? La garantie que nous donne la convertibilité est-elle si négligeable que ça, surtout maintenant que nous ne sommes plus dans un tête à tête délétère avec la France mais sommes de facto liés à la zone euro dans son ensemble ? Pouvons-nous jouer l’Europe contre la France pour nous libérer des accords léonins qui nous lient à cette dernière ?

Beaucoup d’activistes qui s’agitent contre le FCFA me semblent commettre deux fautes de raisonnemment assez graves :

  1. D’abord ils confondent cause et conséquence : je suis le premier à admettre que le système dans lequel nous nous mouvons est fondamentalement injuste. Nous sommes maintenus par la France dans une relation de dépendance économique. Il nous faut nous libérer de ce carcan pour nous développer. Le FCFA est l’un des constituants de ce carcan et l’un des instruments privilégiés de la domination française. Je suis tout prêt à l’admettre. Je ne crois cependant pas que le CFA soit la cause de cette domination. Cette dernière est multifactorielle. L’un des facteurs les plus importants me paraît être notre situation objective. Nos économies sont exsangues, non pas seulement parce que nous sommes politiquement dominés mais parce que nous n’avons pas suffisamment investi dans un système éducatif efficace, nous ne soignons pas notre population, nous ne promouvons pas l’efficacité économique, nous n’investissons pas suffisamment dans notre agriculture et n’éduquons pas nos paysans etc. Tous ces problèmes là ne seraient pas du tout solutionnés par une éventuelle sortie du FCFA. Il me semble que plus que le FCFA, ce sont ces facteurs là qu’il faut changer pour améliorer notre situation économique. Quand cette dernière se sera améliorée, nous aurons les cartes en main pour contrôler notre monnaie. Si nous contrôlons notre monnaie alors que notre économie et nos sociétés sont toujours dans une situation catastrophiques, cela ne servira à rien d’autre qu’à nous enfoncer davantage.
  2. Deuxième faute de raisonnement qu’ils commettent à mon avis : penser l’économie hors contexte. Ils ont cela en commun avec la plupart des économistes. Par exemple, tout le monde se souvient de la phrase de Smith sur la main invisible, très peu retiennent ce qu’il dit sur la psychologie des marchands : « une compagnie de marchands est, semble-t-il, incapable de se considérer comme un souverain, même après l’être devenu. Les marchands (…) par une étrange absurdité ne tiennent le caractère de souverain que comme accessoire à celui de marchand. » Les marchands, nous dit Smith, alors qu’ils auraient intérêt à avoir un gouvernement arbitre seraient tellement obnubilés par le profit qu’ils seraient incapables de ne pas ruiner tout pays qu’ils contrôleraient. Ce n’est nulle part ailleurs que dans La Richesse des Nations qu’il le dit pourtant, c’est passé totalement inaperçu de la plupart des économistes qui se réclament de lui et qui veulent que le rôle du gouvernement soit réduit à la portion congrue. De la même manière la plupart des penseurs qui exigent que nous sortions du FCFA ici et maintenant pensent hors contexte en ne tenant aucunement compte de notre situation politique. Une chose qui devrait nous mettre la puce à l’oreille est que Idriss Déby est partisan de la sortie du FCFA. À quel moment se retrouver dans le même camp que Déby ne vous fait-il pas réfléchir ? Déby dont la gestion de l’économie tchadienne est tellement catastrophique qu’il avait nommé son frère directeur des douanes puis s’était retrouvé obligé d’emprisonner ce même frère parce qu’il refusait de reverser les recettes douanières au trésor public. Imaginez-vous ça ? Un pays ou une personne privée s’approprie les recettes douanières ? Sortir du FCFA en l’état actuel des choses, c’est soumettre notre monnaie entre autres à Idriss Déby. Je ne fais déjà pas confiance à Macky Sall mais Idriss Déby ? !!! C’est là malheureusement notre contexte actuel. Qui vaut-il mieux pour gérer notre monnaie ? Un mixte de fonctionnaires africains et français contrôlés par l’Europe ou bien des pillards incompétents cooptés par d’inamovibles dictateurs et dont la seule préoccupation est de s’enrichir ? Je suis comme tout le monde, ça me tue de savoir que même ma monnaie n’est pas sous mon contrôle. Il n’en demeure pas moins qu’entre Idriss Déby et Jean Claude Junker ou Emmanuel Macron, je ravale ma fierté et je choisis les seconds plutôt que le premier. Avant de détricoter le délicat édifice qu’est le FCFA, je préfère réaliser un certain nombre de préalables. Le plus important de ces préalables est le fait d’avoir dans toute la zone CFA des dirigeants élus et comptables de leurs actes devant une justice indépendante. Tant que ce préalable n’est pas réalisé, je considère que le contexte n’est pas favorable à une sortie du FCFA. Parce que rien ne serait plus catastrophique et humiliant que de sortir collectivement du FCFA puis de se retrouver dix ans plus tard avec un champ de ruine et d’aller quémander l’aide de la France pour sauver notre économie. Gageons qu’elle nous ferait payer son « aide » au prix cher.

Dans tous ces débats là, vous savez ce qui m’énerve le plus ? C’est la légèreté avec laquelle nous sommes prêt à sacrifier la vie et le bien être économique de millions de nos compatriotes africains au nom d’un panafricanisme de polichinelle. J’ai beaucoup de respect pour Kako Nubukpo par exemple mais où se trouve-t-il actuellement ? À Paris à travailler pour l’AUF l’OIF Si la zone CFA s’effondrait serait-il personnellement affecté ? Beaucoup de personnes qui s’activent pour la sortie du FCFA tout de suite soit vivent en Europe ou aux USA soit sont payés par des capitaux non africains. Ils vont tenir leur posture d’Afroclowns et m’accuser d’être un nègre de maison parce que je dis que ce ne serait peut être pas une bonne idée de sortir tout de suite de la zone CFA ou de rompre avec l’occident. En attendant, moi je vis au Sénégal, avec un passeport sénégalais et suis payé par l’État du Sénégal. Je n’ai pas la latitude de tenir une posture et de jouer au révolutionnaire avec ma propre monnaie. Je contribue concrètement à créer les conditions pour que le FCFA devienne obsolète et que les termes de l’échange avec le reste du monde change.

 

Fontenelle et la crise de l’euro

Posted in Economie, Spéculation gratuite by hadyba on octobre 27, 2011

Toute l’agitation des chefs de gouvernement européens sur la crise de européenne actuelle me fait penser à ce texte de Fontenelle:

« En 1593, le bruit courut que les dents étant tombées à un enfant de Silésie, âgé de sept ans, il lui en était venu une d’or, à la place d’une de ses grosses dents. Horstius, professeur en médecine dans l’université de Helmstad, écrivit en 1595 l’histoire de cette dent, et prétendit qu’elle était en partie naturelle, en partie miraculeuse, et qu’elle avait été envoyée de Dieu à cet enfant pour consoler les chrétiens affligés par les Turcs. Figurez-vous quelle consolation, et quel rapport de cette dent aux chrétiens ni aux Turcs. En la même année, afin que cette dent d’or ne manquât par d’historiens, Rullandus en écrit encore l’histoire. Deux ans après, Ingolstetetus, autre savant, écrit contre le sentiment que Rullandus avait de la dent d’or, et Rullandus fait aussitôt une belle et docte réplique. Un autre grand homme nommé Libavius ramasse tout ce qui avait été dit de la dent, et y ajoute son sentiment particulier. Il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages, sinon qu’il fût vrai que la dent était d’or. Quand un orfèvre l’eut examinée, il se trouva que c’était une feuille d’or appliquée avec beaucoup d’adresse ; mais on commença par faire des livres, et puis on consulta l’orfèvre. »

« Rien n’est plus normal que d’en faire autant sur toutes sortes de matières. Je ne suis pas si convaincu de notre ignorance par les choses qui sont, et dont la raison nous est inconnue, que par celles qui ne sont point, et dont nous trouvons la raison. Cela veut dire que non seulement nous n’avons pas les principes qui mènent au vrai, mais que nous en avons d’autres qui s’accommodent très bien avec le faux. »

— Fontenelle, Histoire des oracles, IV. (Source)

Je ne suis pas en train de dire qu’il n’y a pas de crise en Europe. Ce dont je suis sûr en revanche, c’est que ça ne sert à rien d’organiser des réunions de la dernière chance tous les trois mois en essayant de prévenir une apocalypse. Ce que Fontenelle nous conseillerait, ce serait de réunir des économistes et leur demander d’étudier ce qui se passe et de proposer des solutions. Tant que ce travail préalable d’observation et d’analyse n’est pas fait, les réunions de la dernière chance peuvent au mieux, maintenir le statut quo, au pire dégrader la situation.

En l’occurrence, il me semble que notre dent d’or est l’idée qu’une baisse de notation par Moody’s entrainera nécessairement un renchérissement du crédit. Ça ne semble clairement pas arriver depuis que la note US a été dégradée par S&P.

Ajustement structurel en Europe

Posted in Economie by hadyba on octobre 9, 2011

Au tout début de la crise de 2008, un de mes amis qui vit aux États Unis m’avait dit avec un peu de schadenfreude: « Ils vont donc vivre ce que nous avons vécu dans les années 80-90! » Il pensait aux politiques d’ajustement structurelles que les pays africains ont du subir après que la crise des années 70 nous avait complètement ruiné. Je lui avais dit qu’il n’y avait aucune chance que ça passe en Europe parce que les pays européens sont démocratiques. Ce que je ne voyais pas dans mon inondable naïveté, c’est la force de Tina. Face à ce qui se passe actuellement en Grèce et la panique ignorante des dirigeants européens qui n’arrivent même pas à comprendre les mécanismes exacts de la crise économique dans laquelle ils se débattent, je crains fort qu’à un moment ou un autre les technocrates ne prennent le contrôle. Et ils appliqueront les techniques qu’ils ont déjà testé en Afrique.

Si vous êtes européens, c’est peut être le moment de lire (au hasard) cet article de Heba Ahmed Nassar de l’université du Caire sur les Conséquences sociales des PAS en Égypte. Oui, je sais, les pays européens ne sont pas l’Égypte, mais on sait jamais…

Le travail ne se partage pas

Posted in Economie, France by hadyba on septembre 11, 2011

La droite française contre les 35h qui, comme chacun le sait, sont responsables de tous les malheurs de la France depuis 1776:

Le travail ne se partage pas

……

Justin Wolfers économiste de Wharton à propos du nouveau plan de Obama:

– It’s reasonably clever, removing the incentive to fire people, rather than reduce hours. (aka “Job sharing”)

Source

Après, on peut argumenter que comparaison n’est pas raison, que ce qui marche chez ces barbares d’américains quand leur taux de chômage avoisine les 9% ne marche pas nécessairement en France quand le taux de chômage stagne à 9% et tutti quanti. Mais justement, si la droite française était sérieuse, elle argumenterait plutôt que de répéter bêtement un slogan. By the way, comment était l’emploi en France et les déficits publics quand les incompétents gauchistes ont créé les 35h et les emplois jeune?

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Debunking afrophile

Posted in Economie, France, immigration by hadyba on août 17, 2011

Slate Afrique se livre à un debunking des idées reçues sur l’Afrique qui circulent en France.  C’est intéressant et c’est ici. A la toute fin, ils écrivent:

Surtout, l’étude conduite par le professeur Chojnicki et remise en juillet 2010 au ministère des Affaires sociales montre que l’immigration rapporte 12 milliards d’euros à l’Etat français (48 milliards de dépenses et 60 de recettes). Elle contredit celle menée par Jean-Paul Gourévitch en 2008, qui faisait apparaître un solde négatif de plus de 26 milliards d’euros pour le contribuable français du fait de l’immigration. Comment peut-on, en deux ans, arriver à de tels écarts ? Ce doit être ça, la magie «blanche».

Je pense que la magie en question est non pas « blanche » mais gauloise et consiste dans le fait de prendre au sérieux les écrits d’un guignol comme Gourévitch qui n’a aucun moyen de savoir quels sont les vrais chiffres de l’immigration, n’ayant jamais montré au cours de sa longue carrière la plus infime connaissance des chiffres, diplômé en InfoCom de surcroît. Chacun est bien évidemment libre de jouer les statisticiens amateur une fois arrivé à la retraite et de nourrir ses obsessions par ce biais. Mais quiconque le considère comme un expert à la place des statisticiens de l’INSEE ou des vrais universitaires qui ont passé leur vie à manipuler des données démographiques ne fait rien d’autre qu’exhiber sa propre stupidité. Le choix est-il vraiment entre ce guignol avec un respectable professeur d’université ayant écrit une dizaine de papiers techniques sur des questions de démographie migratoire?

Si vous pensez que l’alternative est pertinente, n’arrivez pas à choisir, ou (surtout) si vous choisissez le premier, j’ai une bonne nouvelle pour vous. Je sais qu’on ne vous la fait pas à vous et que vous êtes d’accord avec cette sage parole de Hamlet « Il y a plus de choses sur la terre et dans le ciel, Horatio, qu’il n’en est rêvé dans votre philosophie. » Justement, je vais vous confier un secret: je suis l’héritier d’une longue tradition de sorciers africains qui connaissent les secrets de la magie la plus noire. Je reconnais en vous un frère d’âme et je veux vous aider. Confiez moi vos économies, toutes vos économies et je les multiplie par 100 rien qu’en récitant dessus une formule secrète et en les rangeant dans une calebasse spéciale que j’ai héritée de mes aïeux. Nous allons commencer avec un billet de cinq euros pour que vous vous rendiez compte que ça marche puis nous passerons aux choses sérieuses. Écrivez-moi si ça vous intéresse. Je suis sûr qu’un type aussi intelligent que vous ne laissera pas passer cette occasion. Mais chut! il ne faut pas ébruiter mon offre, c’est un secret.

PS: Je peux également vous aider à trouver l’amour, vous rendre irrésistible et même vous faire perdre du poids. Et ceci en toute confidentialité! Mais n’allez surtout pas chez ces magnifiques escrocs.

L’AMF applique la charia

Posted in Economie, France by hadyba on août 12, 2011

En tant que musulman, je ne puis qu’être ému: mon rêve de faire appliquer la charia à l’Univers tout entier semble en passe de se réaliser et encore une fois, c’est la France, pays des Droits de l’Homme qui ouvre la voie de l’Évolution. Jugez-en vous même:

Le ministre de l’Economie François Baroin a «salué» vendredi dans un communiqué la décision prise la veille au soir par l’Autorité des marchés financiers (AMF) d’interdire la vente à découvert de onze valeurs financières pour quinze jours.

Source

Bien sûr, ce n’est qu’un début, ils finiront bien par se rendre compte que les intégristes ont raison qui disent que tout, absolument tout, de la gestation à la physique en passant par les finances se trouve dans le coran. Par exemple comparez cette sage décision avec ceci:

Pour éviter le recours à l’intérêt, la finance islamique a mis au point certains instruments d’investissement comme lamoucharaka et la moudaraba déjà cités (voir le lexique en bas de page). Par ailleurs, certaines pratiques à haut risque sont proscrites, à commencer par la vente à découvert, une pratique accusée d’avoir accéléré la crise financière, certains spéculateurs ayant parié sur la baisse des marchés mondiaux de capitaux.

Source

Les ultralibéraux avaient pour habitude de nous dire que TINA. Apparemment, l’alternative, c’est entre eux et le Coran. Et en ce moment, ils n’ont pas l’air très glorieux. Je suppose que la question que l’on doit se poser, la seule qui importe réellement vue la gravité de notre situation, est celle de savoir si nous devons nous placer sous le giron de ces barbares de la Maison de Saoud ou sous celui de l’imam Khamenéi.

PS: Suis-je le seul à avoir l’impression que nous sommes dirigé par des idiots qui ne comprennent rien à l’économie et qui n’ont pas non plus la sagesse de s’en remettre à de vrais économistes plutôt qu’à des idéologues pour éclairer leurs décisions?

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Édifiant

Posted in Economie, Politique by hadyba on avril 27, 2011

Au détour de ce profile du New York Magazine sur Krugman, cette précision édifiante qui montre à quel point il est idiot que la classe moyenne vote à droite.

It was Krugman’s Princeton colleague Larry Bartels who made the critical connection, in research Krugman devoured and still cites. Perhaps the most important influence on income inequality, Bartels argued, was something economists had not ­emphasized: whether a Democrat or a Republican was in the White House. Since World War II, Bartels found, wealthy families in the 95th percentile in income had seen identical income growth under both parties. But for families in the 20th percentile, the difference was astonishing: Under Democratic presidents, their income grew at six times the rate it did under Republican ones. There was, for Krugman, a kind of radicalization implied in this.

Je n’ai pas les chiffres pour la France mais je suis sûr qu’ils seraient comparables. Par exemple, le gouvernement français actuel a mené toutes sortes de politiques favorables aux plus fortunés. En revanche, les prélèvements tombant sur les classes moyennes ainsi que les prix des denrées de premières nécessité n’ont pas baissé et ont même souvent augmenté. Et les salaires ont évidemment stagné. N’empêche que comparé au reste du monde, la France est un petit paradis; la preuve:

He thinks for another minute. It might not have been Utopia, he says, but it could have been France. But now these possibilities seem further away than ever.

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Borgne au pays des aveugles?

Posted in Economie, Sénégal by hadyba on avril 9, 2011

Je n’étais pas au courant de ça:

Depuis la crise politique en Côte d’Ivoire en 2002, le Sénégal est devenu la première économie en Afrique de l’Ouest.

Source.

J’aurais cru que le Mali et le Burkina nous dépasseraient vue l’incompétence de nos dirigeants. Je vais quand même vérifier avec mes copains au ministère des Finances avant de féliciter Me Wade. En même temps, si malgré sa corruption et celle de son entourage, nous sommes les premiers, imaginez ce qu’il en aurait été si nous avions un gouvernement normal!

Euh… ou alors qu’est-ce que ça doit être dans les autres pays!

Adorer Dieu et le diable

Posted in Economie by hadyba on mars 31, 2011

Une justification de l’ultralibéralisme de Hayek est son darwinisme social. Il pense que les hommes ont des aspirations, des connaissances et des capacités différentes. Dans la sphère publique, ces hommes interagissent selon ces différents paramètres et aboutissent, dans la poursuite de leur propre intérêt, à un équilibre. Le marché ne fait qu’agréger toute l’information disponible et retourner l’équilibre qui y correspond. Nous sortons tous le matin pour chercher notre pitance et à la fin de la journée, selon leur ingéniosité, leur force et les circonstances, certains rentrent repus alors que d’autre meurent en chemin. Il est absurde nous dit Hayek de se placer du point de vue de l’affamé et de dire que le résultat est injuste ; il n’est ni juste, ni injuste c’est simplement ainsi qu’est le monde. Nous ne pouvons échapper à la lutte pour la survie. Cette dernière, n’est pas limitée aux sociétés primitives. Si la démocratie libérale est supérieure aux totalitarismes, c’est qu’elle laisse l’individu libre de prendre des initiatives et de créer de la richesse s’il le désire. Bien sûr, Hayek pense que les démocraties libérales réelles ne sont pas encore assez libérales. Étant donné que : « la fonction des prix et des salaires est moins de rétribuer les individus pour ce qu’ils ont fait, que de leur dire ce qu’ils devraient faire (règles de conduite) dans leur propre intérêt comme dans l’intérêt général. », une société véritablement démocratique devrait minimiser les interférences du politique dans l’économique. Par exemple, les indemnités chômage, la sécurité sociale publique, le salaire minimum… ne devraient pas exister. Mais pourquoi devrait-on faire confiance à la sélection naturelle plutôt que d’essayer d’en corriger les effets ? La justification de Hayek était la suivante :

 

La liberté laissée à chacun d’utiliser les informations dont il dispose sur son environnement pour poursuivre ses propres desseins est le seul système qui permette d’assurer la mobilisation la plus optimale possible de l’ensemble des connaissances dispersées dans le corps social […]Si la liberté est devenue une morale politique, c’est par suite d’une évolution naturelle qui fait que la société a progressivement sélectionné le système de valeurs qui répondait le mieux aux contraintes de survie qui étaient celles du plus grand nombre .

 

Quand j’ai lu cela pour la première fois, je me suis dit que Hayek était fondamentalement un déterministe Old School même s’il semble soutenir que c’est parce que nous ne pouvons pas tout savoir que nous devrions nous en remettre au marché. Souvenons-nous que la profession de foi du déterminisme universel se trouve dans L’essai philosophique sur les probabilités de Laplace. Être déterministe, ce n’est pas dire que nous devons tout savoir, c’est dire que dans les cas où nous ne savons pas, ce n’est pas parce que le monde est inconnaissable per se, mais parce que nos facultés mentales et notre état de connaissance font que nous ne savons pas tout. De ce fait, nous complétons notre savoir par le biais de la théorie des probabilités. Dans cette vision du monde, le hasard n’est pas consubstantiel au monde mais est un mot creux désignant notre ignorance du mécanisme causal à l’oeuvre.

 

Hayek me paraissait déterministe en ce sens là parce qu’il considérait qu’il existait un certain nombre de règles (certes trop complexes pour être connues a priori) auxquelles les agents obéissaient et qui faisaient que l’agrégation de leurs comportements aboutissait à un équilibre qui était le meilleur possible pour le plus grand nombre. A cette vision du marché, il me semblait que l’on pouvait opposer les travaux de Mandelbrot qui montraient que les fluctuations de la bourse obéissent à ce qu’il nomme le hasard sauvage. Alors que l’on pouvait tirer de Hayek la certitude que le marché laissé à lui même aboutissait à un équilibre plus ou moins satisfaisant, Mandelbrot nous montrait que le marché libre produisait nécessairement des fluctuations extrêmes. Ce qui explique que des krachs boursiers surviennent dans des places financières dérégulées. Ce n’est pas là une anomalie mais une conséquence prévisible du hasard sauvage à l’oeuvre dans le marché. En bon keynésien, la conséquence que je tirais de cette analyse était qu’une certaine dose d’intervention gouvernementale était indispensable parce que même si nous savons que les gouvernements peuvent être incompétents, nous savons avec encore plus de certitude que des fluctuations extrêmes et extrêmement dévastatrices pour toute l’économie surviendront dans des marchés libres.

 

Si j’écris ce post, c’est que suite à la discussion qui s’est développée sous ce billet, j’ai réalisé que Nassim Nicholas Taleb se réclamait à la fois de Hayek et de Mandelbrot. J’ai un peu l’impression que cela revient à vouer un culte à Dieu et au Diable en même temps. Qu’en pensez-vous ?

PS : Si cet article vous a intéressé, vous pouvez tout aussi bien jeter un coup d’oeil à ceci: CoursFlorian(pdf)

Blasphème

Posted in Economie by hadyba on mars 23, 2011

Lord, have mercy on us!

Étant donné que Krugman est Dieu, toute critique de son oeuvre est ipso facto un blasphème. Ceci dit, ce blasphémateur est intéressant qui pointe ce qu’il voit comme les contradictions du Seigneur.

Bien sûr, le croyant que je suis pourrait aisément lui rétorquer que ce qu’il voit comme blasphèmes ne sont rien d’autres que paradoxes* illustrant la profondeur du message divin.

Du même blasphémateur, ce texte comparant Nicholas Nassim Taleb à Kanye West mérite d’être lu.

…..

*Plus sérieusement, l’une des critiques qu’il fait à Krugman et à Delong est qu’ils sont arrogants en affirmant qu’ils sont convaincus d’avoir raison et qu’ils ne lisent pas les sites conservateurs. Le problème, c’est que quand tu es confronté aux mêmes solutions qui sont connues pour être inefficaces, à un moment donné, tu cesses de les prendre en considération et tu avances. Et c’est là qu’on t’accuse de ne pas être ouvert à la critique parce que tu ne discutes pas avec l’idiot du village. Ce qui est inquiétant de nos temps, c’est que l’idiot du village porte un costume et conseille le Parlement de la première puissance mondiale.